Les 40 ans de la transcription de la langue afar : Quarante années d’efforts pour la promotion de la langue afar

Placée sous le haut patronage du président Ismaïl Omar Guelleh, grand défenseur des langues maternelles, la cérémonie de célébration du quarantième anniversaire de la transcription de la langue afar a été présidée hier au palais du peuple par le Premier ministre Abdoulkader Kamil Mohamed. Des délégations venues de Suède, de Belgique et d’Ethiopie y ont participé. Cette cérémonie, organisée par l’UDC, la doyenne des associations djiboutiennes, créée en 1975 et l’Afar Pen, a été haute en couleurs. Elle a permis de jeter un regard rétrospectif sur le chemin parcouru depuis ce jour de 1974 où, dans une forêt du sud de la Somalie, Dimis et Reedo décidaient de transcrire en latin leur langue maternelle.

Langue orale vieille comme l’humanité, l’afar a un jour changé de statut pour devenir une langue écrite. L’idée de transcrire l’afar en lettres latines est née dans une forêt somalienne du nom de Birweene. C’était en 1974. Deux jeunes intellectuels afars, Ahmed Abdallah Dimis et Gamal Abdoulkader Redo, qui y suivaient alors un entraînement militaire parmi soixante autres camarades venus de toutes les régions afares, en sont à l’origine.

L’ouvrage, publié en 1975, s’intitulera Dimis Kee Reedo comme en a décidé Ahmed Hassan Laqde qui était alors une sommité parmi les artistes djiboutiens d’expression afar.

Quarante ans plus tard, les deux anciens maquisards se sont retrouvés hier au palais du peuple où l’UDC, créée en 1975 et l’Afar Pen, de création plus récente, célébraient les quarante ans de la transcription de la langue afar.

Cette cérémonie grandiose, placée sous le haut patronage du président de la République, M. Ismaïl Omar Guelleh, grand défenseur des langues maternelles, a réuni sur place le Premier ministre Abdoulkader Kamil Mohamed, le président de la région afar d’Ethiopie, M. Ismaïl Ali Siro, Gamal Abdoulkader Redo, des délégations venues de Suède, de Belgique et d’ailleurs ainsi qu’une palette de ministres et de parlementaires djiboutiens.

De nombreux intellectuels parmi les plus brillants de leur génération, Cassim Ahmed Dini, Chehem Watta, Aramis Soulé, entre autres, et des personnalités politiques connues comme M. Abdallah Kamil ou l’ambassadeur Mohamed Moussa Chehem, y ont participé.

La cérémonie a été retransmise en direct par la RTD. Cette cérémonie a d’abord marqué les esprits par la beauté des spectacles présentés par l’UDC et l’Afar Pen. Aïcha Mohamed Robleh, ancienne ministre et ancienne parlementaire, qui est surtout connue pour ses talents de dramaturge, a manifestement le sens du spectacle et de la mise en scène.

Les chorégraphies étaient parfaites, le chant et le mouvement étaient en harmonie. Maîtresse de cérémonie au talent incontestable, Mme Mariam Bouha, journaliste à la RTD, a été, elle aussi, parfaite dans son rôle.

Elle a eu les mots justes tout au long de cette cérémonie de célébration d’une aventure humaine qui a connu des hauts et des bas et qui, surtout, a nécessité de la part de ses acteurs un réel engagement basé sur le seul désir de faire quelque chose pour la langue maternelle.

Comme toute commémoration, celle-ci a été riche en discours, parfois un peu longs. C’est à M. Mohamed Kamil Ali, président de l’Afar Pen, qu’échut l’honneur de prendre la parole en premier. Ancien secrétaire-général du MPL, membre-fondateur de l’UDC et de son ancêtre, l’Avenir, Mohamed Kamil, ancien directeur-général de Djibouti Télécom, consacre aujourd’hui l’essentiel de son temps et de son énergie à la promotion de la langue au sein de l’Afar Pen.

Il constitue, avec Aïcha Mohamed Robleh, le tandem de tête de ce combat. Il a évoqué dans son discours la genèse de cette aventure collective mais aussi et surtout ce qui a été réalisé. Il a rendu hommage au président Ismaïl Omar Guelleh pour son appui à la promotion des langues maternelles. Il a également salué le travail des dirigeants de la région afar d’Ethiopie qui ont fait de l’afar une langue d’administration et d’enseignement. Succédant à M. Kamil, Mme Aïcha Mohamed Robleh, a mis de côté son discours écrit pour en improviser un autre, art dans lequel elle excelle en raison de son expérience de comédienne.

Son humour, ses saillies et ses expressions imagées ont égayé la salle. Elle a rendu hommage au grand chanteur Abdallalé, aujourd’hui disparu, qui a su sortir de l’oubli des œuvres enregistrées dans les années soixante en les adaptant aux goûts de la jeunesse d’aujourd’hui.

Elle a également rendu hommage aux membres de la Rédaction de Yaf Yinti, de jeunes intellectuels bénévoles comme M. Gaddaay, M. Saïd Kamil ou encore M. Abdoulkader Mohamed Ali, un fin lettré qui fut au début des années 2000 le cofondateur d’Arhotabba, au Canada, avec son ami Diltourab.

Elle a sans doute oublié d’évoquer le rôle majeur qui fut celui de Radio-Djibouti au service des langues maternelles depuis soixante ans. La RTD demeure aujourd’hui encore le principal porte-voix des langues et des cultures.

Puis ce fut au tour de M. Gamaladdin Abdoulkader Reedo, de prendre la parole. Accompagné de son ami de toujours, Dimis, M. Redo a eu droit à une longue standing-ovation. Homme d’engagement et d’action, Reedo est une figure des luttes multiformes menées dans une Corne de l’Afrique en ébullition à une époque charnière : les années 70.

« Ce furent, a-t-il dit, des années exaltantes où toutes les révolutions ont commencé ; c’est dans les années 70 qu’a été créé le mouvement qui dirige aujourd’hui l’Ethiopie, c’est au cours de ces années-là que d’autres mouvements comme le MPL ou le FLCS ont été créés. » M. Reedo a rappelé qu’à l’époque déjà, quelques intellectuels avaient transcrit l’afar à leur manière. Il a cité, entre autres, M. Chedeville.

« Dimis et moi avons tout simplement adopté une transcription qui soit accessible au plus grand nombre de peuples afin que notre langue et notre culture puissent être ouvertes aux autres ». Il a rappelé que leur ouvrage a été intitulé ainsi par Ahmed Hassan Laqdé, grand auteur-compositeur auquel il a rendu hommage, de même qu’à son alter ego Mohamed Ali Talha, autre grand créateur.

La cérémonie a été, nous l’avons dit, riche en discours. Les deux derniers ont été prononcés par le président de la région afar d’Ethiopie, M. Siro, et par le Premier ministre djiboutien, Abdoulkader Kamil.

Alors que M. Siro a axé son discours sur les efforts déployés par la région II de la fédération d’Ethiopie pour faire de l’afar la langue du travail et de l’enseignement, le Premier ministre djiboutien a évoqué pour sa part tous les moyens mis en œuvre en RdD sous la houlette du président Guelleh afin de permettre aux deux langues nationales du pays, l’afar et le somali, de s’adapter au monde moderne, aux nouvelles technologies, etc. Il a félicité les responsables du Pen Afar et du Pen somali pour leurs efforts conjoints de promotion des langues maternelles.

La cérémonie a été clôturée par une remise de prix aux plus méritants des défenseurs de la langue afar. Le Premier ministre et les autres officiels présents ont ensuite été conviés à une visite des stands où étaient disposés les ouvrages parus au cours des quarante dernières années sur la langue et la culture afar, aussi bien en français qu’en afar.

ABS

 

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